01/07/2021
Préambule
La perte de chance peut être définie comme la disparition certaine du fait d’un tiers d’une éventualité favorable d’une chance d’obtenir un gain ou de la chance de limiter une perte.
L’indemnisation ne peut être égale à la totalité du gain manqué ou de la perte mais se limite à une somme correspondant à la seule chance perdue.
Pour évaluer le préjudice lié à une perte de chance, il faut :
- Etablir le caractère certain de la perte de chance par son lien de causalité avec le préjudice ;
- Evaluer la totalité du préjudice ;
- Estimer la probabilité de réalisation de la chance.
Montrer la certitude de la perte de chance
Il doit, dans un premier temps, être démontré le lien de causalité entre le fait du tiers qui serait à l’origine de la perte de chance et le préjudice.
Ce qui revient à dire que, pour écarter l’existence d’un préjudice de perte de chance, il faudra caractériser l’absence de toute probabilité d’obtenir un gain ou de limiter une perte.
Par exemple, il peut y avoir une perte de chance de conclure un nouveau contrat de vente en cas de bris de machine du fait d’un tiers qui rend impossible toute production.
La perte de chance sera certaine s’il est démontré que le produit, qui ne peut plus être fabriqué, est un produit courant qui répond à un besoin du marché, et que l’entreprise a toutes les capacités à intervenir sur ce marché.
En revanche, si l’entreprise doit disposer par exemple d’un agrément ou d’une qualification pour vendre ce produit et qu’elle ne dispose pas de ce document, le bris de machine qui empêche de produire ne peut alors constituer une perte de chance.
L’expertise devra apporter des éléments de faits pour démontrer que la disparition de l’éventualité favorable d’une chance du fait d’un tiers est en lien direct avec le préjudice allégué.
Evaluer la totalité du préjudice
Il faut ensuite évaluer la totalité du préjudice qu’aurait procuré la chance si celle-ci s’était réalisée.
Le préjudice peut être un gain perdu ou une perte.
On s’attachera à décrire et à quantifier la situation qui aurait celle qui se serait alors produite si la chance s’était réalisée.
Dans l’exemple ci-dessus de la perte de chance à la suite d’un bris de machine, on évaluera quelles sont les ventes potentielles du produit d’après les données du marché, celles de la concurrence, les échanges commerciaux, l’historique des ventes, etc..
Il sera ainsi caractérisé une situation de référence réaliste en fonction des éléments de faits qui auront été recueillis pour évaluer la totalité du préjudice si la chance s’était réalisée.
Estimer la probabilité de réalisation de la chance
Il faut enfin évaluer la fraction du préjudice à affecter à la perte de chance.
L’approche quantitative est parfois possible lorsque nous disposons par exemple d’un taux de transformation d’un devis en contrat basé sur un historique.
L’approche qualitative sera retenue si nous ne disposons d’aucun moyen mathématique pour apprécier cette probabilité.
Dans l’exemple du bris de machine ci-dessus, ce n’est pas parce que l’entreprise aurait pu produire les pièces, qu’elle les aurait nécessairement vendues.
Il existe d’autres facteurs indépendamment du bris de machine qui concourent à la vente de ces pièces.
L’entreprise aura, par exemple, plus de chance de vendre ces pièces si les relations commerciales sont presque abouties et si des échantillons ont été produits et validés, que dans le cas contraire.
Pour évaluer la probabilité à retenir, on s’attachera à déterminer les autres facteurs qui concourent à la réalisation du gain manqué ou à la limitation de la perte, et à apprécier le poids de chacun de ces facteurs.
Synthèse
Pour établir un préjudice économique lié à une perte de chance, il doit être démontré le lien de causalité entre la perte de chance du fait du tiers et le préjudice. Ainsi, la perte de chance sera certaine.
Puis, il faut évaluer la totalité du préjudice constitué par le gain manqué ou la perte si la chance s’était réalisée.
Enfin, il faut évaluer la fraction du préjudice à affecter à la perte de chance en déterminant s’il existe d’autres facteurs qui peuvent concourir au préjudice.
Pour aller plus loin
Etablir un arbre des causes entre le fait du tiers à l’origine de la perte de chance et le préjudice peut être éclairant.
Il permet d’établir le lien de causalité entre la perte de chance et le préjudice.
Il permet aussi d’apprécier le poids des autres facteurs concourant à la réalisation du préjudice et ainsi d’évaluer la fraction du préjudice à affecter à cette perte de chance.